Dans le monde de la formation, le retour sur investissement ou ROI est un sujet qui revient trés fréquemment. Les entreprises veulent savoir combien "rapporte" une formation ce qui parait tout à fait sensé. Commencent alors des calculs complexes qui ont pour objectif d'aboutir sur un chiffre, un pourcentage qui indiquera les bénéfices de la formation par rapport aux sommes investies.
Dans le cadre de ma fonction de consultant formation, j'ai été amené à effectuer des recherches à ce sujet et j'ai rapidement été confronté à une quantité assez impressionnante d'informations. Cependant, je me suis rendu compte que la plupart des articles ou webinaires ne traitaient le sujet qu'en surface expliquant en détails le concept mais sans vraiment approfondir au moment de donner des exemples d'application un peu difficiles. J'en suis arrivé à la conclusion qu'une approche pertinente et efficace me semble aller bien au-delà d'une formule mathématique.
Dans cet article
Comment évalue-t-on l'efficacité des formations ?
Comment calcule-t-on un retour sur investissement (ROI) ?
Pourquoi le ROI ne me paraît pas être la meilleure approche pour identifier les impacts qu'a pu avoir une formation ?
La Success Case Method pour illustrer l'impact réel.
Une approche mixte pour une vue d'ensemble plus pertinente.
Déterminer les objectifs à l'avance.
Quelle méthode pour évaluer l'efficacité d'une formation?
La structure la plus couramment utilisée a été inventée par Donald Kirkpatrick en 1954. Le "modèle Kirkpatrick" traite de l’évaluation de la formation des employés sur quatre niveaux, le cinquième ayant été ajouté plus tard :
Réactions : satisfaction des participants, degrés d'implication et de contribution à la formation, possibilités d'application des acquis ...
Apprentissages : acquisition de nouvelles connaissances et compétences.
Transfert de connaissances, comportements : les participants appliquent-ils les nouveaux acquis dans leur travail ?
Résultats qui se matérialisent à la suite de la formation.
Voici l'application du modèle à un exemple de formation sur de nouvelles techniques de ventes :
Questionnaire de satisfaction distribué aux participants pour recueillir sur leur avis sur la formation (contenu, durée, utilité, ...)
Un QCM distribué aux participants pour tester leurs connaissances sur les nouvelles techniques apprises
Un an après la formation, les participants et leurs managers sont consultés pour établir si les nouveaux outils ont été mis en application.
Les résultants de l'entreprise/équipes/vendeurs sont analysés et démontrent, par exemple, des ventes en hausse de 20% pour les personnes ayant assisté à la formation.
Ce modèle donne donc une structure qui permet d'avoir une idée de l'efficacité de de l'impact d'une formation à plusieurs niveaux.
Mode de calcul du ROI et défis :
Quelques décennies plus tard, Jack J. Phillips a ajouté un cinquième niveau, le calcul du retour sur investissement (ROI) et créé le ROI Institute.
La formule est à la base très simple. Il suffit de diviser les bénéfices de la formation par les coûts et de multiplier par 100.
Ainsi, si je reprends l'exemple de la formation en ventes qui a permis une hausse de 20% des résultats, en imaginant que cela représente une somme de 45 000€ et que la formation a coûté 15 000€, le ROI est donc de 300%.
Cela paraît simple mais ce chiffre ne nous donne pas vraiment d'information sur l'impact réel si ce n'est que la formation a rapporté trois fois plus que ce qu'elle a coûté. La satisfaction client a-t-elle augmenté ? A-t-on réussi à mieux les fidéliser ? Les nouvelles techniques ont-elles une efficacité similaire sur tous les types de produits ? De plus, qu'en est-il si la formation en question se fait sur le thème du Leadership ou de l'intelligence émotionnelle ou encore de la gestion du temps ? C'est ici que se présente le plus important défi dans le calcul du ROI : convertir les résultats en valeur monétaire.
Certes il y a des données disponibles. Gallup a notamment estimé qu'un employé désengagé coûte à son entreprise 34% de son salaire annuel et qu'un employé engagé entraîne -25% d'absentéisme. Des chiffres existent donc mais comment isoler l'effet réel de la formation ? Si les employés sont plus engagés, est-ce grâce à la formation de leadership que leur manager a suivie ? Partiellement sans doute. Le fait est que tous ces calculs nécessitent beaucoup de temps et d'énergie pour finalement, obtenir une valeur qui ne sera pas forcément très précise et qui ne reflètera pas la réalité.
Une approche qualitative.
Une autre approche est nécessaire, celle qui consiste à raconter une histoire : la Success Case Method (SCM) selon un livre de Robert O. Brinkerhoff publié en 2003. Elle nécessite de changer de perspective dans le sens où nous n'allons pas analyser tous les résultats et données mais se concentrer délibérément sur les cas où l'application des apprentissages a été un succès et/ou un échec en se posant les questions suivantes :
Lorsque le programme a fonctionné, comment a-t-il fonctionné ?
Qu'est-ce qui a fonctionné et qu'est-ce qui n'a pas fonctionné ?
Cela peut paraître une hérésie mais le fait de focaliser son temps et son énergie sur ces "extrêmes" plutôt que sur des calculs laborieux et incertains permet d'y voir beaucoup plus loin : quels sont les facteurs qui favorisent la mise en applications des acquis.
La mise en œuvre se fait en quatre étapes.
Une approche mixte.
La SCM est donc très intéressante pour "raconter" ce que la formation a permis d'achever et d'obtenir des pistes pour pouvoir l'améliorer. Toutes les données évoquées un peu plus tôt ne sont plus au centre de l'approche mais peuvent être utilisées pour compléter le tableau et étayer les conclusions de la SCM. Vous dégagez aussi une liste de facteurs qui ont favorisés la mise en application des acquis ou, au contraire, y ont fait obstacle. Une approche mixte de ce type me semble être le moyen de plus efficace pour obtenir une vue globale qui reflète vraiment la réalité. De plus, lorsque vous souhaitez présenter les résultats, raconter une histoire est la meilleure façon de captiver son audience.
Dernière réflexion : déterminer les objectifs en avance est la clé du succès
Finalement, peu importe comment vous souhaitez vous y prendre pour déterminer l'impact d'une formation, il est essentiel de définir précisément les objectifs à atteindre avant le début du programme pour éviter de vous disperser dans votre approche. Selon une étude de 2019 de Brandon Hall Group "The current state of talent assessments", seulement 16% des organisations associent les compétences des équipes aux objectifs de rendement (ROI). Pourtant, lorsque la direction dans laquelle vous souhaitez aller est claire et précise, il est beaucoup plus facile et plus efficace de mettre en place le bon programme. Vous devez alors prendre la pyramide de Kirkpatrick à l'envers.
Quels sont les résultats que nous souhaitons obtenir ? Hausse des ventes, amélioration du taux de satisfaction des clients, moins de casse en production, diminution du nombre d'accidents, augmentation du nombre d'employés engagés ...
Quels comportements les participants devront-ils mettre en œuvre pour atteindre ces résultats? Meilleure écoute des clients, nouveaux outils pour approcher les clients, meilleure communication du manager, changement de comportement au poste de travail
Que devront apprendre les participants lors de la formation pour maîtriser puis mettre en application ces nouveaux concept ? Quelles techniques et outils ?
Comment sera structurée la formation pour favoriser cet apprentissage ?
Non seulement cette approche vous permettra de créer une formation adaptée aux besoins mais vous préparez aussi le terrain pour le calcul du ROI et/ou pour la mise en œuvre de la SCM. Finalement vous aurez une idée assez précise de l'impact qu'aura eu le programme de formation.
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